"LE FONDS MIS EN FORME"

EXPOSITION SCHOELCHER A HOUILLES

Victor SCHOELCHER (1804-1893) fait partie de ces humanistes qui ont marqué l'histoire française. Il avait choisi Houilles comme résidence de campagne. Une exposition (terminée maintenant) à l'hôtel de ville, lui a rendu hommage en mettant en lumière près de 400 pièces issues des collections du fonds Schoelcher.

L'exposition s'articule autour de quatre volets : l'esclavage, les abolitions de l'esclavage de 1794 et 1848, les amis et les détracteurs de Victor Schoelcher, les derniers moments de sa vie à Houilles.

 

Le visiteur a pu y découvrir des objets uniques (porcelaines, statues, gravures, documents, manuscrits...) ayant traversé le temps et les frontières, témoins d'une époque et de la vie d'un homme hors du commun.

"Il existe un trésor qui appartient aux Ovillois et que nous souhaitons voir devenir pérenne", explique Christine Gentil, commissaire de l'exposition et archiviste de la Ville.

Victor Schoelcher à 4 ans, dessiné par Jean-Auguste-Dominique Ingres (1808)

 

 

 

Victor SCHOELCHER (1804-1893) est issu d'une famille alsacienne.

 

Son père, Marc Schoelcher, reprit en 1798 une manufacture de porcelaine créée par Pierre-Antoine Hannong, de la lignée des fameux céramistes alsacien, et située dans le quartier du Faubourg Saint-Denis.

 

Dès 1806, il loue un magasin de vente dans le quartier le plus élégant de Paris : boulevard des Italiens.

Théière de la manufacture du Faubourg Saint-Denis.

Certes, Victor Schoelcher est surtout connu pour avoir défendu la cause des esclaves noirs faisant l'objet de la traite négrière opérée par les colons français, mais on sait moint qu'au nom de l'égalité des droits, il soutint aussi la cause des femmes.

 

Il s'associa aux travaux menés au sein de la Société pour l'amélioration du sort des femmes, lors du Congrès international du Droit des femmes (1878) et du Congrès anticlérical qui eut lieu au Grand Orient de France en 1881.

Les décembriseurs (1874)

Victor Schoelcher écrira pendant sa vie de nombreux ouvrages, la plupart militants et engagés.

 

Alors député de la Mattinique, rentré à Paris depuis 1870, il écrit en 1985 l'instruction républicaine n° 22 en condamnant encore une fois les agissements des bonapartistes et de l'armée lors du coup d'Etat du 2 décembre 1851 et auxquels il donne l'appellation de "décembriseurs". Il signe "Victor Schoelcher, proscrit du 2 décembre".

 

Il écrit une "Histoire des crimes du 2 décembre", "Le crime de décembre en province". Il dénonce les arrestations, les traitements infligés aux prisonniers par « la Terreur bonapartiste », le régime que « les restaurateurs de l’ordre ont inauguré en France », l’abandon de la liberté individuelle aux « caprices et à l’insolence de la police », ainsi que la création de « Commissions mixtes » pour remplacer les conseils de guerre, cours d’appel, tribunaux et préfets et pour procéder aux jugements des insurgés.

 

Féru d'art et de musique, il rédige en 1857 une Vie de Haendel - "Life of Haendel". Les éditeurs musicaux Escudier ne publièrent pas le volume de la Vie de Händel que Schoelcher leur remit en français en 1859. Les écrits de Schoelcher, qui venait de refuser l’amnistie que Louis-Napoléon Bonaparte avait concédée en août 1859 aux proscrits du 2 décembre 1851, étaient encore considérés comme politiquement « dangereux ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans son ouvrage "La famille, la propriété et le christianisme", il considère que la doctrine de la religion chrétienne est loin d'être favorable à la famille et qu'elle menace la propriété.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

"Le journal « Anticlérical », n° 81, publie une caricature de Schoelcher sur la barricade du faubourg Saint-Antoine, tenant dans sa main une plume et son livre « Histoire des crimes du 2 décembre ».

 

Devant lui, se trouve une stèle sur laquelle il est indiqué « Ici gît Baudin ».

La publication "Colonies étrangères et Haïti, résultats de l'émancipation anglaise" contient de nombreux renseignements sur les colonies anglaises (Dominique, Jamaïque, Antigua) en rendant compte des premiers effets de l'abolition de l'esclavage dans les colonies britanniques, sur les colonies espagnoles (Puerto Rico, Cuba), danoises (Saint-Thomas, Sainte-Croix) et sur l'île d'Haïti, ainsi que l'acte pour l'abolition de l'esclavage dans les colonies anglaises votée en 1833. Sont traitées aussi les questions de la traite et de son origine, du droit de visite et de l'affranchissement.

 

 

 

L'insurrection de Saint-Domingue mènera à l'indépendance de l'île en 1804.

 

Suite à cet épisode tragique et intense, Victor Schoelcher publie un livre en 1889 sur la "Vie de Toussaint Louverture".

 

Si, pour Lamartine, « cet homme fut une nation », pour Schoelcher, Toussaint Louverture, stratège exceptionnel, « grandi dans la lutte jusqu’à provoquer l’admiration, n’eut pas assez de force morale pour s’affranchir de son passé d’esclave,

 

il s’abaissa au pouvoir jusqu’à devenir un tyran ».

Le cri des Africains contre les Européens, leurs oppresseurs ou coup d'oeil sur le commerce homicide appelé traite des Noirs par Thomas Clarkson (1821)

 

Le grand mérite de l'exposition réside dans la présentation de documents et de manuscrits originaux datant du XIXème siècle.

 

Ces documents font froid dans le dos. Citons entre autres :

 

- l'Aperçu de l'Administration des Finances de la France Année 1787- Ensemble le Rapport de l'Etendue et de la Population du Royaume et des Colonies Françoises d'où il ressort que Saint Domiingue est la colonie la plus riche avec un montant d'imposition de 6 940 000 F soit quasiment six fois celui de la Martinique et que sur une population totale de 321 900 habitants, 280 000 sont des esclaves

- le compte de vente de 351 captifs (répartis en nègres, négresses, négrillons, négrites)

- les revenus coloniaux des îles du vent, répartis par pays (Espagne, Portugal, Angleterre, Hollande, France)

- le cri des Africains dénonçant les conditions de la traite

- le livre de comptes d'une compagnie commerciale de Nantes

- la récapitulation du navire Le Sénaut recensant les ventes du navire, esclaves compris

 

Encore ces documents ne sont-ils que des documents "objectifs". Mais que dire des prises de position en faveur de l'esclavage et de l'économie suscitée par l'exploitation des Noirs ?

 

Ainsi figurent en bonne place la rédaction par Pierre Gédéon d'un "Mémoire sur laffranchissement des nègres dans nos colonies et sur la prohibition de la traite des noirs à la côte d'Afrique, l'action menée par Thomas Marie Adolphe Jollivet (1799-1848), députéde 1830 à 1848, en outre délégué de la Martinique.

 

Que dire aussi de la déclaration de Rémusat (rapport du 12 juin 1838) : "il nous paraît suffisamment prouvé que l'abolition immédiate et complètre de l'esclavage serait prématurée".

 

A ces prises de position, on peut heureusement opposer celles, outre de Victor Schoelcher, de l'abbé Grégoire, de Cyrille Bissette, du duc de Broglie, de Tocqueville

Pour ternminer sur une note positive, quoi de mieux que ces gravures qui illustrent l'accession - enfin - à la liberté et aux droits de l'homme ?

MOI LIBRE AUSSI

Champion de la défense des esclaves, Victor Schoelcher eut droit aux honneurs de la nation.

50 ans après son décès, son corps sera transféré au Panthéon, le vendredi 20 mai 1949, en même temps que Félix EBOUE, Gouverneur général des colonies, officier de la Légion d’Honneur et Compagnon de la Libération.

Une médaille a été frappée en son honneur en tant que Sénateur Inamovible (1875-1893). Un hommage lui a été décerné le 2 décembre 1888 à Paris, en reconnaissance au « Grand Honnête Homme », au « Citoyen, au représentant du peuple, à l’écrivain, à l’infatigable travailleur ».

Le 4 juillet 1948, une cérémonie fut organisée par la ville de Houilles et son maire, H. Varlet, à l’occasion de l’inauguration du buste de Victor SCHOELCHER, en présence de Monsieur Monnerville, Président du Conseil de la République.