CARRIERES PENDANT ET APRES

LA REVOLUTION FRANCAISE

 

LE PREMIER DRAPEAU DE LA REVOLUTION FRANCAISE

"VALEUR ET BONNE FOI"

 

 L'ORGANISATION REVOLUTIONNAIRE

A l'époque révolutionnaire, Carrières perdit son nom de Carrières-Saint-Denis, rappelant par trop ses origines chrétiennes et sa fondation par les abbés de Saint-Denis et rebaptisée Carrières-sur-Seine, en raison de sa proximité avec le fleuve.

 

Comme tant d'autres communes, Carrières est administrée par deux comités : le Comité de Salut Public et le Comité de Surveillance - ou Comité Révolutionnaire.

 

A cet effet, deux commissaires sont dépêchés à Carrières le 27 nivôse An II de la République (1) pour pourvoir à leur création : "Antoine François REVILLON, administrateur du District de la Montagne du Bon Air (2) et Etienne François BERGE, membre du comité de surveillance révolutionnaire de ladite commune, commissaire nommé par l'administration du district de ladite Montagne du Bon Air".

« Après avoir pris les renseignements nécessaires au renouvellement des autorités constituées en cette commune, nous avons dressé la liste suivante :

Commune de Carrières sur Seine

Pierre BALLAGNY, fils Jacques, Maire

Jean Batiste MANDRIN, agent national

Officiers Municipaux

Nicolas PAUREAU

Jean Baptiste BRENU

Laurent SUZANNE

Nicolas SUZANNE, fils Nicolas

Charles GILBERT »

(…)

 

Suivent les noms de notables et des membres du Comité de Surveillance.

 

UN COMITE DE SALUT PUBLIC DE L'AN II

Les deux comités assurent un rôle bien distinct.

L'agent national du Comité de Salut Public local est chargé de « l’exécution des lois, d’entretenir avec l’administration une correspondance exacte et (…) de surveiller la fabrication Révolutionnaire du Salpêtre (3), les Ecoles primaires, les biens des condamnés ou déportés et généralement tout ce qui peut intéresser la sûreté et la tranquillité de la République ».

Les membres du Comité de Surveillance, quant à eux, exercent un rôle de police révolutionnaire et notamment de dénoncer tout citoyen dont le zèle révolutionnaire est jugé trop tiède. C'est la fameuse loi des suspects, mise en place par Robestpierre, qui donnera lieu à tous les égarements de la Terreur, de septembre 1793 à juillet 1794.

___________________

(1) Le 16 décembre 1793.

(2) Saint-Germain-en-Laye.

(3) Le salpêtre servait à la fabrication de poudre à fusil et à canon.

 

 

UN COMITE DE SURVEILLANCE LOCAL

LA COMTESSE DE BUSSY

 

LA COMTESSE DE BUSSY

PAR JEAN-PIERRE CEYTAIRE

PEINTRE DE CARRIERES

L'infortunée Comtesse DE BUSSY résidait au bas de la rue de Bezons à Carrières-Saint-Denis (4). Son seul tort fut, pendant la Terreur, d'appartenir, de par son mariage, à une famille connue de la noblesse. En effet, François Marc Antoine DE BUSSY se vit octroyer par le roi Louis XV le titre de comte ain de représenter le parrain de l'une de ses filles à Fontevrault. Il dut cet honneur à l'amitié qu'avait pour lui l'abbesse de ce monastère.

Louise Antoinette FARGEON, née le 16 novembre 1726 à Montpellier (Hérault), est la fille d'un écuyer, seigneur de Laloure (ou La Lauze), conseiller depuis 1718, sous Louis XV, auprès de la Cour des Comptes des Aydes et Finances de Montepellier.

Elle se marie le 21 avril 1745, à Montpellier, avec Louis François Marc Antoine DE BUSSY, écuyer, seigtneur de Bizay, dont elle aura deux enfants : Marguerite Louise, née en 1746, élevée aux Demoiselles de Saint-Cyr, et François Louis par qui tout arriva.

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(4) Maison de campagne d'Antoinette-Louise FARGEON, comtesse DE BUSSY, déclarée bien national et mise sous séquestre en 1793, comprenant alors deux cours (une donnant sur la Seine), une étable, une écurie, trois remises, un jardin d'agrément avec deux pavillons, un jardin potager. En 1795, ses meubles sont mis en vente. La propriété sera restituée aux héritiers en 1796, qui la revendront le 14 ventôse An XI (4 mars 1803) à Vincent SARAZIN, cultivateur, ancien gardien de la maison.

Contre-révolutionnaire décidé, son fils François-Louis DE BUSSY prêta à fonds perdus, sans en attendre le remboursement, de nombreuses sommes d'argent à des émigrés. On raconte qu'en 1790, le château familial de Bizay fut le théâtre d’un incident qui fit beaucoup de bruit. Au cours d’un dîner, le jeune fils du comte de Bussy entra dans le salon, monté sur un âne, en criant « Hue, hue, hue, en avant la nation ! » ou, suivant d’autres : « C’est moi le Tiers-Etat !"

Sous la Terreur, une commission militaire fut instituée à Angers par les représentants du peuple, jugeant des délits militaires mais aussi des délits contre la sûreté générale. Dans la liste de personnes que cette commission fit monter à l'échafaud, figure François-Louis DE BUSSY, fils de la Comtesse : "Place du Ralliement à Angers (49), le 24 mars 1794 (4 germinal An II) à 4 h du soir : François-Louis BUSSY, noble, natif d'Epieds, décoré de la croix de l'ordre de Saint-Louis ; avec Marc-Antoine JOUSBERT dit DE LA PEPINIERE, noble, né aux Herbiers, maire de la commune du petit bourg des Herbiers".

Convaincu d'intelligence avec les Chouans de Vendée, François-Louis DE BUSSY est donc condamné à la peine de mort par la Commission Militaire de l'Armée de l'Ouest à Angers, le 4 Germinal de l'An II et exécuté à Angers le 25 mars 1794.

 

EXTRAIT DU JOURNAL : "ILS ONT PERDU LA TETE..."

Dès lors, les soupçons reposent sur Madame DE BUSSY et sur sa maison de Carrières-sur-Seine, où des papiers jugés illicites y sont probablement cachés. Ainsi, la municipalité de Carrières-sur-Seine reçoit l’ordre du district de perquisitionner au domicile de la Comtesse. Cette perquisition est reportée au registre des délibérations de la commune en ces termes :

« Du 4 & 5 Pluviôse de la Commune de Carrières-sur-Seine

« Les Maires, Officiers Municipaux et Notables adjoints se sont transportés dans la maison de la Cidevant Comtesse De Bussy seize dudit Carrières assisté de Vincent Jolis notable qui en avait les clefs, à l’effet de faire la visite municipale sur ses papiers d’après les recherches faites et avoir Examiner les dits papiers n’ont rien trouvé de contraire aux lois de la République ce qui certifie véritable, arrêté en la chambre commune et inscrit sur le registre de la municipalité le cinq Pluviôse l’an second de la République française une et indivisible.

Matis secrétaire, Bresnu Maire

Baucheron Officier, Leclerc Officier, Dehays Officier,

Ballagny Notables, Sarazin Officier ».

Arrêtée le 6 Floréal de l’An II, jour de la Saint-Champignon du calendrier républicain (soit le 25 avril 1794 du calendrier grégorien) elle est incarcérée à la prison de la Maison Egalité.

 

Le 8 Floréal An II, elle est amenée pour un bref interrogatoire devant Gabriel DELEGE, juge au Tribunal Révolutionnaire, assisté de GIRARD, commis-greffier.

 

Elle comparait le 9 Floréal avec 38 accusés devant le tribunal révolutionnaire dont le ministère public était assuré par l’infatigable FOUQUIER TINVILLE, pourvoyeur de l’échafaud.

 

Dans cet interrogatoire, Madame DE BUSSY certifie ne pas avoir entretenu une telle correspondance depuis 1792 et déclare choisir comme défenseur le citoyen BOUTRONNE.

 

Condamnée à mort, elle est exécutée vingt-quatre heures après, le 10 Floréal de l’An II, jour de la Saint-Râteau du calendrier républicain, soit le 29 avril 1794. La comtesse DE BUSSY fut donc la victime innocente de la commune de Carrières-sur-Seine qui succomba à la loi des suspects mise en place par ROBESPIERRE.

 

EXTRAIT DU JOURNAL : "ILS ONT PERDU LA TETE..."